Projet de Cité Éducative : le cas d’école la Ville de Lormont

J’ai gardé de ma vie professionnelle le goût d’aller à la rencontre des acteurs de terrain pour instruire les dossiers. Tandis que le projet de Loi pour une École de la confiance a été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale en février, j’ai retrouvé, le temps d’une journée, les bancs de l’école pour évoquer un autre projet phare de la politique conjointe de la Ville et de l’Éducation, la « Cité Éducative ». 

Le mois dernier, lors du débat du Président de la République avec les Maires de Gironde, j’avais échangé avec Jean Touzeau, Maire de Lormont, à propos du projet « Cités Éducatives » auquel la ville candidate.

Lorsque celui-ci m’a proposé de visiter son dispositif d’éducation en quartier prioritaire, j’ai saisi l’occasion d’aller observer sur le terrain les premiers résultats de notre politique d’éducation prioritaire en Rep+ et mieux comprendre les dispositifs de demain.

 

L’ECOLE, LIEU D’EMANCIPATION ET CARREFOUR D’ÉDUCATION

Accompagnée de Mme Josette Belloq, Première Adjointe de la Ville de Lormont, déléguée à l’éducation, à l’enfance et la petite enfance, je suis allée à la découverte des innovations et expérimentations du système éducatif de la Ville, en direction des publics des quartiers prioritaires.  Au programme : rencontres avec les enseignants de classes dédoublées, les enfants et quelques acteurs-clés de la « Réussite Éducative » de Lormont.

 

Une école plus inclusive

Première étape : l’école maternelle Eugène Leroy qui privilégie la pré-scolarisation des enfants de 2 ans, au coeur d’un QPV.

La démarche d’inclusion et de co-éducation mise en place dans l’école est particulièrement innovante : pendant 6 semaines à compter de la rentrée (sept-nov) les parents sont accueillis au sein de l’école afin de favoriser l’intégration des enfants et de leurs parents dans une démarche éducative co-construite.

Des conseils peuvent être apportés en fonction des problématiques familiales ou de celles des enfants, et les parents orientés vers d’autres services afin de leur apporter une réponse adaptée (PMI, CMP etc.).

L’inscription n’est pas sectorisée : souvent en difficultés, les familles sont identifiées et orientées vers cette école (familles monoparentales et/ou isolées) par les acteurs sociaux.

Les classes sont organisées en sous-groupes et le projet pédagogique fait la part belle à l’innovation.

L’inclusion des parents au sein de l’école est un objectif fondamental de la politique de Ville à Lormont comme en témoignent Mme Plaudet, responsable du « Programme réussite éducative » de la Ville, et Mme Longdechamp, chargée de mission Parentalité, avec lesquelles je partage un déjeuner de travail.

Dans les quartiers prioritaires, les familles sont souvent éloignées de l’institution et par conséquent peu pou pas investies dans la réussite éducative de leurs enfants.

Parallèlement, cette réussite éducative passe aussi par un accompagnement pluriel des acteurs sociaux (PMI, MDSI, CMPEA, centres de loisirs/animation, ARS, etc.) et la coordination des acteurs de la toute la sphère éducative de l’enfant.

Cette cohérence des actions permet de cerner avec précision le profil d’un enfant et de lui apporter un accompagnement sur-mesure pour une prévention efficiente dès la petite enfance.

 

 

Le numérique bouscule l’école

Nous avons ensuite assisté à deux cours des écoles élémentaires Marcel Pagnol et Paul Fort dans des classes dédoublées CP et CE1 (Rep+).

Sur l’ensemble de la ville, 56 classes sont ainsi concernées par le dédoublement.

Les classes de 12 ou 15 élèves sont particulièrement apaisées et permettent à l’enseignant de réaliser un travail qualitatif et adapté au niveau du groupe.

Si les résultats en termes de réussite ne sont pas encore mesurables, force est de constater que l’enseignant est plus disponible avec des effectifs réduits. Cela lui permet notamment de mieux évaluer les difficultés des élèves.

Dans les deux classes, les pratiques pédagogiques sont particulièrement innovantes notamment grâce à un équipement de tablettes et de tableaux numériques.

Ainsi, les enfants taguent des QRCodes affichés au mur, qui renvoient à un site ou un formulaire correspondant à la leçon et travaillent ainsi en sous-groupes de manière autonome.

Très à l’aise, les enfants s’approprient ainsi l’outil numérique, mais aussi la navigation ou les formulaires en ligne, usages dont on sait qu’ils ne leur sont pas si familiers qu’on ne le croit.

 

Concours d’éloquence

Dans l’après-midi, j’ai également eu la chance de rencontrer Zineb, « Messagère » des CM2 de l’école élémentaire Paul Fort, qui a remporté le prix du Concours d’éloquence organisé samedi dernier par la ville.

Formidable exercice de cohésion et d’apprentissage, ce concours des « Messagers » a permis à près de 500 élèves de primaires, collèges et lycées de se confronter à l’exercice difficile de l’art oratoire.

Désignée par ses camarades, coachée par sa professeure des écoles, Zineb nous a présenté avec beaucoup de talent son intervention, co-écrite avec l’ensemble de sa classe, sur un thème tout à fait d’actualité « Écouter l’autre pour qu’il nous écoute » !

 

L’infirmerie à émotions 

L’école est le lieu d’apprentissage des fondamentaux mais aussi celui de l’expression des enfants, en positif ou en négatif.

Dans les quartiers prioritaires, les enfants amènent bien souvent à l’école leurs difficultés familiales ou matérielles, une violence aussi parfois, et son lot d’émotions.

La Ville de Lormont met en place un dispositif innovant appelé « L’infirmerie à émotions » créé par Sylvie Hazebroucq.

Espaces d’expression au sein de l’école, elle permet de trouver des solutions d’urgence aux débordements que les émotions provoquent et de les laisser s’exprimer sans compromettre le collectif-classe

À l’aide d’installations et de méthodes spécifiques (tapis de la colère, écharpe à émotions…), l’enfant est extrait de la classe, accompagné d’un adulte formé, afin de lui permettre de relâcher les tensions.

À Lormont, des agents da cantine, des Atsem et des animateurs mais aussi des enseignants sont aujourd’hui formés à ce dispositif.

 

60 CITÉS ÉDUCATIVES À LA RENTRÉE 2019

Engagée au sein du groupe de travail Quartiers Politique de la Ville, je partage avec mes collègues la conviction que l’éducation est le levier principal et fondamental de l’émancipation dans les quartiers populaires. C’est d’ailleurs l’un des principaux objectifs de la feuille de route de la politique de la Ville du gouvernement.

Porté par Julien Denormandie – Ministre chargé de la Ville et des territoires, et Jean-Michel Blanquer – Ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse, le label « Cités éducatives » auquel la Ville de Lormont se porte candidate, a été officiellement lancé en novembre dernier.

Il s’adresse aux quartiers prioritaires afin de concentrer sous sa bannière l’ensemble des actions et d’expérimentations du territoire en matière d’éducation, et d’enseignement, en associant tous les acteurs dans une démarche cohérente : enseignants et parents mais aussi agents, animateurs, Atsem ou éducateurs.

Dispositif global, le principe de « Cité éducative » fédère toutes les énergies autour de l’enjeu éducatif pour avoir une vision complète du temps de l’enfant.

Le projet de loi de finances 2019 prévoit une enveloppe de 34 millions d’euros dédiée à ce programme pour soutenir une soixantaine de sites en quartiers prioritaires à la rentrée.

 

Pour en savoir plus 👉

https://www.cget.gouv.fr/actualites/les-cites-educatives-un-projet-global-et-ambitieux-autour-de-l-ecole